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·31 March 2025
Dunkerque - PSG : le discours puissant de Demba Ba sur le racisme et l'islamophobie

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·31 March 2025
Demain soir, le Paris Saint-Germain défiera l’USL Dunkerque en demi-finale de la Coupe du Roi. Si les Nordistes restent sur deux exploits contre Lille et Brest, c’est un autre défi qui les attend ce mardi tant le PSG semble imbattable en France. Malgré tout, Demba Ba veut y croire, lui qui a eu des mots puissants sur le racisme et l’islamophobie avant la rencontre.
Nous sommes le 9 décembre 2020, le Paris Saint-Germain reçoit l’Istanbul Basaksehir à l’occasion d’un match de groupes de Ligue des champions. Ce jour-là, Demba Ba demande l’arrêt de la rencontre après des propos jugés racistes de la part du quatrième arbitre Sébastien Coltescu à l’attention d’un joueur du club turc. Un peu moins de cinq ans plus tard, celui qui avait crucifié Paris en quart de finale de C1 avec Chelsea en 2014 va retrouver le club de la capitale demain soir (21h10) à l’occasion de la demi-finale de Coupe de France entre Dunkerque et le leader de la Ligue 1
Et avant ce choc, il a tenu à nouveau des propos forts sur le sujet du racisme et de l’islamophobie dans une interview accordée au Parisien : « C’était la première fois qu’on arrêtait un match pour des propos racistes et discriminatoires. Malheureusement, cinq ans après, les choses n’ont pas bougé. Tout le monde doit être traité de la même manière sur un terrain de foot. Je réagis systématiquement quand je vois des choses injustes (…) Le combat de la discrimination doit être celui de tout le monde. Je n’ai pas décidé d’être noir ou sénégalais. Quand on nous attaque, on est obligé de réagir. Cela peut déranger les gens. Je ne le fais pas parce que j’aime la polémique. Je préférerais que personne n’ait à me juger pour ma couleur de peau, j’en serais très heureux. »
Un combat qu’il juge naturel et qu’il continuera de mener durant toute sa vie : « Pour moi, ce n’est pas être engagé de voir une injustice et essayer de la rectifier. Je suis un homme qui a des convictions. Et je m’exprime quand je ressens une situation qui n’a pas lieu d’être. Il faut réfléchir aux différentes façons de faire changer les mentalités. J’ai espoir de voir les choses changer un jour même si je ne vois pas comment le racisme pourrait disparaître complètement. Mais au moins diminuer. Cela a déjà évolué. Surtout quand on compare depuis un siècle. Il faut continuer. L’éducation, c’est dès le plus jeune âge. C’est à ce moment qu’on crée des croyances dont celles qu’il n’y a pas de race supérieure. Je parle d’éducation par la sphère des parents mais aussi celle du sport et de l’Éducation nationale. Le plus important, c’est ce que tu as au fond de ton cœur. »
Interrogé ensuite sur les insultes reçues à répétition par Vinicius Jr, le Sénégalais lui a apporté tout son soutien : « Il faut de la force de caractère avec tout ce qu’il subit depuis plusieurs années. Les gens le jugent souvent par son comportement. Est-ce que son comportement a amené les supporters à lui lancer des insultes racistes ou est-ce qu’il réagit comme ça car il en a marre d’être confronté très régulièrement au racisme ? Mais quoi qu’il arrive, même si un joueur a un mauvais comportement sur un terrain de foot, tu ne peux pas te venger en tenant des propos racistes. Il faut se mettre à la place du joueur pour savoir ce qu’il vit, comment il intériorise, il interprète. Je trouve qu’on vit dans un monde où on doit se montrer beaucoup plus tolérant les uns envers les autres » a-t-il déploré avant de ne pas se montrer très convaincu par les différentes campagnes de la LFP à ce sujet : « Cela fait combien de temps qu’il existe des campagnes ? Le problème de fond reste l’éducation. Comment je vais éduquer un gamin et lui montrer qu’il n’y a pas de différence entre le blanc, le noir, le jaune, le marron… Comment je vais lui expliquer. »
Autre sujet dénoncé par sa part, l’islamophobie : « C’est un problème de tolérance et de connaissance. Allons les uns vers les autres et asseyons-nous autour d’une table, communiquons et apprenons à nous connaître. Réglons surtout les vrais problèmes. Il y a des gens qui ne mangent pas tous les jours, d’autres qui meurent car il n’y a pas assez de médecins dans les hôpitaux… Certains font un combat et je ne pense pas que leurs intentions soient pures. Au sein de ma famille, il y a des femmes voilées et des femmes non voilées. Personne ne force personne à quoi que ce soit. J’ai joué et vécu dans de nombreux pays (7). J’ai réussi à me connecter avec les autres sans changer qui je suis. Donc, ça veut dire qu’il y a possibilité de le faire. Pourquoi ? Car j’étais dans leur pays donc j’ai appris à les connaître et eux ont appris à me connaître. Et à partir de là, le plus important c’est le cœur. (Il marque une pause). Certaines personnes m’ont taxé d’extrémiste et d’islamiste pour mes prises de position dans le passé (notamment lorsqu’il avait soutenu le Collectif contre l’islamophobie). Mon fils aîné a trois prénoms dont Pierre, quel extrémiste je suis ? Je me répète mais le plus important c’est la tolérance. Celui qui a bien compris sa religion ne peut pas être raciste. »
Seul directeur du football à être noir en France, l’ancien attaquant s’est ému de cette exception : « Il faut demander à ceux qui les choisissent. Je suis effectivement le seul homme noir à mon poste dans le foot français et il y en a très peu dans le monde. Avant de venir à Dunkerque, un club hésitait entre deux directeurs sportifs et être noir n’a pas joué en ma faveur. Si je dois être trois fois meilleur, je le serai. Je m’efforce d’être compétent tous les jours pour ne pas qu’on me ramène au fait que je suis noir. »
Malgré tout, il a conclu en parlant sportif et ne donne pas beaucoup de chances à son équipe de vaincre l’ogre parisien. Mais il veut mener la vie dure aux Rouge et Bleu: « On va préparer notre plan de jeu et essayer de les contrer dans ce qu’ils font de mieux. On se dit aussi que la magie de la Coupe de France va continuer à nous suivre… Mais je ne mets pas de billes sur la magie de la coupe (rire). On va tout faire pour prendre un maximum de plaisir et en donner ». Pour rappel, la rencontre aura lieu au Stade Pierre Mauroy, où l’USLD avait réussi l’exploit de faire tomber le LOSC en huitième de finale. Bis repetita demain ? L’avenir le dira !
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